Le rêve avait bien une part de réel, et cette part concernait bien celle qu'il pensait. Dès qu'il la vit, un flot de tendresse l'envahit spontanément. Il la prit dans ses bras, doucement. Il avait besoin de lui montrer qu'il était encore là, et elle avait besoin de le sentir aussi comme il put s'en rendre compte à la façon dont elle se blottit tout contre lui.
Deux corps enlacés, pressés l'un contre l'autre aux abords de la cité des hommes. En cette seconde fusionnelle, le monde aurait pu s'écrouler.
Elle gémit un peu au moment où ses doigts glissèrent dans ses cheveux. La peau était encore sensible sous les bandages. Il s'occupa alors de les refaire avec précaution, vérifiant attentivement qu'elle ne souffre pas d'autres blessures que cette bosse et ces coupures.
Ma pauvre Natchü, il ne t'a pas manquée...
Il sentit confusément qu'elle avait quelque chose à lui dire.
Son regard était changé, elle ne le regardait plus de la même façon.
Il n'était plus un bel inconnu... c'était comme si... comme si il était son inconnu à elle, comme si...
Il en fut étrangement mal à l'aise... A l'heure où son propre destin s'engageait sur une autre voie, serait-il possible que de son côté à elle... elle laisse enfin éclore ce qu'il l'avait supplié de lui accorder depuis tant de semaines ?
Trop tard... c'était trop tard... De peu certes, mais trop tard tout de même. Il ne pouvait être pour elle l'élu de son coeur, il avait eu un choix à faire entre la tendresse de celle qui lui offrait tout et le brillant de celle qui ne lui donnait que la forme...
Il enrageait.
Il était à la fois étrangement reconnaissant et encore plus énervé contre l'aggresseur. Reconnaissant que cet individu ait su activer le déclic qu'il avait tant attendu, et enragé que ça se soit produit si tard.
Natchü... Ma Natchü... Natchü l'enchanteresse, la flamboyante, la séductrice de chaque heure... ton bel inconnu a donné son coeur et même s'il accepte de t'aimer, même s'il a préservé pour toi cette place de tendre complice... sauras-tu t'en contenter ?
Il avait envie de hurler avec les loups contre ce destin qui une fois de plus s'acharnait à lui rendre difficile sa quête du bonheur.
Cette nuit là ils se donnèrent sans retenue l'un à l'autre encore une fois.