La soirée fut longue.. et douloureuse…
Le parchemin qu’ils avaient récupéré la dernière fois, une fois traduit, avait donné quelques indices sur l'avancement de la corruption des dragons. Les maîtres dragonniers avaient indiqué qu’il leur fallait dans un premier temps rassembler quatre tablettes ; chacune se trouvant au pied des portails menant au rêve d'émeraude. Seradane serait le premier.
Rendez vous fut pris pour le Nid d’Aigle, dans les Hinterlands. Pour sept d’entre eux tout du moins.
Elle avait passé le début de soirée à pêcher quelques anguilles et autres calmars, se ressourçant un instant sur les rivages de la région, loin du tumulte habituel de la ville.
L’expédition serait difficile, elle le savait et avait eu besoin de se concentrer un peu, priant Elune à l’écart de tous pour qu’elle les protège des dangers qui ne manqueraient pas de se dresser contre eux.
En ralliant le point de rendez vous, elle eut le bonheur de croiser son Loup qui avait fait un détour, juste le temps d’échanger un baiser et un moment de tendresse partagée. Leurs soirées seraient occupées mais loin l’un de l’autre, et ces séparations, fussent-elles de courte durée, leur vrillaient le cœur et l’âme. A regret, ils relâchèrent la douce étreinte, gardant leurs mains enlacées le plus longtemps possible.. Leurs doigts se quittèrent, évanouissant un dernier geste tendre. Un signe de la main, un ultime baiser envoyé et ils s’éloignèrent, guettant jusqu’au dernier moment la silhouette de l’autre disparaissant dans l’horizon.
Les Dragonniers rejoignirent ensuite le portail, en convoi serré. A leur habitude, quelques bons mots et quelques blagues fusèrent, mais derrière l’apparente bonhomie, on sentait poindre la concentration et quelques appréhensions. La soirée ne serait pas de tout repos… Elles ne l’avaient jamais été. La corruption qui gagnait du terrain ne faisait qu’inquiéter un peu plus l’ordre.
Les draconniens étaient nombreux.. très nombreux… Des patrouilles quadrillaient la zone, rempart inquiétant protégeant Ysondre et le Cherche Rêve.
Une fois… deux fois.. ils buttèrent sur ces rondes avant d’enfin pouvoir avancer un peu plus avant. Leurs semi-défaites ne faisaient que les conforter dans leur devoir de libérer ces âmes corrompues.
Rothos les pris par surprise, les laissant tous à terre, évanouis et englués dans son acide putride. Remis sur pieds, encore un peu chancelants, ils repartirent au combat plus déterminés que jamais..
A terre de nouveau… Ils se relevèrent encore…et encore…. Et enfin il virent à bout de ce géant vert.
Puis ils gravirent prudemment les marche de l’autel, restant à distance respectable du Cherche-Rêve.
Majestueux, le garde d’Ysondre était là, devant eux. Impressionnant. Redoutable. Son apparente tranquillité ne faisait que masquer une terrible violence qui ne manquerait pas de se déverser sur eux au moindre faux pas. S’encourageant du regard, ils foncèrent, les plus forts devant, elle en retrait, soignant et priant sans relâche… Le premier assaut les virent reculer rapidement, soignant quelques plaies et relevant les évanouis. Serrant les dents plus que jamais, ils repartirent à l’offensive et bientôt, sous les coups et la ténacité des Dragonniers, le Cherche-Rêve s’écroula à leurs pieds… ce n’était plus qu’un vieux cauchemar… De ses serres, tomba la tablette recherchée.
Ysondre, au sommet de l’autel se dressait, noble.
Ce fut l’assaut de trop... ils tombèrent tous…
Ne se sentant plus la force de lutter contre ce dragon majestueux, ils reculèrent.
Aucun mot ne fut échangé mais dans leurs regards, on pouvait y lire à la satisfaction d’avoir récupéré la première tablette, première pièce du puzzle encore bien incomplet.
Ils se quittèrent sur le pont de singe, et sautèrent rapidement dans le portail ouvert pour la cité des Hommes.
Elle précipita vers l’auberge d’un pas las et mal assuré.
Les accrocs à sa robe attendraient bien le lendemain. Pour l’instant, elle ne souhaitait rien d’autre que retrouver les bras de son aimé. Tous ses muscles lui faisaient mal, et les bleus seraient sans doute nombreux… Elle se sentait vidée, sans force.
Elle laissa tomber un à un les vêtements abîmés et salis. A pas feutrés, elle glissa sous les draps son corps endolori et meurtri, se blottissant doucement contre son aimé endormi, à la recherche de sa chaleur, et attendit un sommeil qu’elle espérait réparateur.