Ainsi donc, après mon éviction du rang des novices d'Elune au collège de Darnassus était venu le temps de quitter Sombrevallon. J'avais toujours pressenti que ce moment arriverait, mais sans avoir réellement de bonne raison de le précipiter. Aller chercher une soeur disparue était un vrai défi, d'autant que j'ignorais totalement ce à quoi elle ressemblait. Tout juste si je savais son nom : "Maléni".
Ma mère avait bien organisé les choses et je ne partais pas les mains vides. Ce n'est toutefois qu'à l'heure du départ qu'elle me fit savoir l'essentiel de ses dispositions : Je ne partirais pas désargenté car elle avait vendu une partie de nos biens et me cédait un héritage anticipé sous la forme de cinq grosses pièces en or frappées à l'effigie de notre grande prêtresse. "Elles ne seront pas de trop pour retrouver ta soeur et pour trouver ta voie." avait-elle déclaré en cet instant. Le ton employé ne souffrait aucune réplique mais je ne m'en offusquais pas. Ainsi était-elle au quotidien, une femme de caractère qui avait défendu farouchement son indépendance financière et sentimentale depuis tant d'années. Je souhaitais intérieurement que mon départ la libère suffisamment pour qu'elle s'autorise à ouvrir son coeur à tous ces gens qui nous avaient offert leur soutien après les années de l'Exil puis de l'installation en Teldrassil.
Je ne me souviens plus en détail du parcours qui me vit traverser de nombreuses lieues jusqu'à Dolanaar puis Darnassus. Les souvenirs sont comme une mer, parcourus de vagues et la suivante efface la précédente en masquant l'horizon à qui vit trop près de la surface.
Oh, Azeroth ne s'était pas arrêtée de tourner, loin de là ! Les jours qui suivirent, une fois passé le temps nécessaire à assimiler cette condition nouvelle et à faire quelques bagages, j'embrassai ma mère, promettant de venir fréquemment la retrouver, ce qu'elle approuva plus que chaleureusement. Elle me fit part de son intention de quitter Sombrevallon pour s'installer en Darnassus, avide de profiter des charmes de la capitale après trop d'années de repli dans un bourg trop petit pour contenir ses besoins de s'ouvrir de nouveau à la vie.
Quid de ce courrier ?
Et bien, aussi incroyable que cela puisse paraître, j'en avais pratiquement oublié l'existence. Ce fut maîtresse Jocaste qui, ouvrant le pli que je lui remettai, tria les quelques feuillets d'un format différent, les identifiant rapidement pour ce qu'ils étaient. Elle me les rendit, d'un ton assez cassant, arguant qu'on ne fabriquait pas ce type de parchemin en Teldrassil et que ce courrier ancien devait être mal rangé. Ma réputation de désordre me précedait déjà !