Quand l'onirisme est destructeur ....

*Nous avançons péniblement dans le froid, la faim nous tenaille et les blessures dues à l’exil se font ressentir. Ces terres inconnues ne sont pas des plus rassurantes et la protection du puits d’éternité n’étant plus, les maladies déciment nos rangs.
Les visages blafards sont las, les plus faibles tombent à terre exténués d’autres ne se relèveront jamais … Les hurlements des mères face à la mort de leur progéniture, les gémissement des enfants, toute cette souffrance aussi bien physique que psychologique affecte notre moral … mais il faut avancer.
Je m’efforce de garder la tête haute pour les miens, je souffre aussi et faire face à ce froid et toutes ces sensations inconnues jusqu’alors, m’est pénible. *

* La jeune draeneï dormait d’un sommeil plus qu’agité et certainement pas réparateur, bien au contraire. Les potions que Hong avait pris soin de concocter avant son départ ne faisaient plus guère effet. *

.....


Je me réveille en sursaut :

« Ils vont payer ces chiens Kaldoreis … »

* Horrifiée par mes propres propos je me retourne vers Hong et fus soulagée qu’il ne soit pas là ; je l’aurais blessé et je m’en serais voulu, j’éclate en sanglot toute en me recroquevillant.
Le chagrin passé je réalisais que j’avais toujours le livre que Mel avait emprunté aux Clairvoyants et je le feuillette afin de trouver une solution à mon problème qui n’avait que trop duré.
Toutes les nuits ce même rêve, ces mêmes angoisses, ces mêmes souffrances : c’était à devenir folle ….. *

Au départ le barde crut que Nhiouashar avait couru car elle paraissait fatiguée, avec une respiration saccadée. Mais il réalisa bien vite qu'il ne s'agissait pas de ça. Après avoir pris le temps de réveiller en douceur son élue, il se permit quelques questions qui mirent en évidence la relative urgence de la situation : la mage draenei souffrait et avait besoin d'aide, et même s'il n'aurait probablement aucune utilité directe à titre personnel, il pourrait au moins veiller à ce que Velassia mette en oeuvre dans de bonnes conditions l'exploration onirique qu'elle proposait à l'instant.

Car tel était bien le problème : un rêve récurrent ruinait le sommeil de la jeune mage et l'empêchait de se reposer efficacement. Quand on savait, de plus, que Hong était absent pour une longue chasse qui le laisserait plusieurs jours loin de leur foyer, on comprenait mieux que les nuits de Nhiouashar tenaient plus du cauchemar que de la partie de plaisir.

Darnassus fut rapidement défini comme le lieu le mieux adapté à l'exploration que Velassia envisageait. Les dons d'empathie de la Kaldorei semblaient s'être encore renforcés par rapport à l'époque de la menace secrète et elle était désormais visiblement capable d'accompagner les rêves des personnes consentantes. C'était assez stupéfiant mais apparemment incontestable. Aénor se proposa pour veiller, par ses talents propres, à contrôler le bon déroulement des opérations et le barde, lui, se chargerait de surveiller les alentours de sorte qu'aucun visiteur indésirable ne vienne mettre en péril ce qu'ils projettaient de faire.

Les jardins du Temple étaient l'écrin idéal. La fatigue de Nhiouashar était patente. Ses traits tirés, son teint terne et son regard à l'éclat voilé en disaient assez sur l'oeuvre destructrice dont elle était la victime. Il n'était que temps d'agir car en vérité le problème datait de longues semaines. En effet elle s'était déjà ouverte à CrileLoup et Aénor de ces soucis, mais après avoir tenté d'en savoir plus, ils s'étaient vite trouvé à court de pistes d'investigation et avaient fait confiance à l'idée de Hong de revoir une vieille femme qui semblait en savoir long sur ce dont souffrait la jeune mage.

Mais l'heure n'était plus aux regrets quant au temps perdu. Après s'être mis d'accord sur la façon de procéder, ils se dirigèrent vers les jardins du Temple à la douce sérénité, et s'installèrent. Nhiou éprouva pendant quelques minutes des difficultés à s'endormir mais son épuisement était tel qu'elle finit par s'éteindre doucement.

L'expérience pouvait commencer.

Après avoir quitté Velassia, CrileLoup et Aénor je rentre chez nous. Assise au bord de l’eau je sors le pipeau et commence à réviser les morceaux que le professeur Cril m’avait proposé.
La surface de l’eau est calme et les rayons du soleil couchant s’y reflètent, la faisant scintiller, danser en rythme.
Les notes s’enchaînent mélodieusement et tendent à m’apaiser jusqu'à ce que je stoppe net la musique, épuisée.

" Par pitié faites n’importe quoi mais pourvu que je ne m’endorme pas … "

On comprend vraiment la détresse de gens lorsqu’ils parlent à une entité inconnue pour leur demander un truc tout bête …. Je ne savais même pas moi à qui je parlais mais je l’avais dit.
Soudain je la vois … je lui souris, tendre, heureuse

" Alors ma belle … "

Et puis je regrette amèrement mes paroles prononcées plus haut. Elle est seule et visiblement son regard en dit long … J’ai peur, il vient de se passer quelque chose.
Snow me presse, mordille ma robe et me tire …
Tout en rassemblant quelques affaires, le souffle coupé, je parvins à balbutier un :

" Je te suis "

presque inaudible …

Ombrelune, cavité dans une des parois rocheuses, Snow ralentit la cadence, la course s’arrête, le temps aussi …
Impossible d’avancer, j’avais peur, peur de ce que j’allais voir … Il est là cela ne fait aucun doute mais dans quel état …
Mon cœur martèle douloureusement ma poitrine, je regarde Snow tachée de sang … le sol aussi est souillé. L’odeur est nauséeuse et la grotte sombre.
Peur Panique Tristesse … non il n’a pas pu m’abandonner, tout .... mais pas ça.
La tigresse passe doucement derrière moi et m’encourage à avancer, la gorge nouée, les yeux embués je me laisse faire, mes forces m’ayant abandonnées.
Il est là gisant dans son sang sur le sol, quelques bandages et des fioles vides sont éparpillées.

« … »
Les mots se bousculent mais ne sortent pas … plus. Mes yeux se posent sur sa poitrine … elle bouge, je soupire et me jette sur lui en pleurant soulagée ...