Réveil brutal...

Aurorielle pénétrait lentement dans la réalité, tirée de son sommeil par les bruits de la ville. Il lui semblait qu'une rumeur lointaine parvenait à son oreille. Quelques badeaux criaient dans les rues de la citée humaine. Elle sortit difficilement de sa couche, gagnant à petits pas la fenêtre de sa chambre. Derrière elle, Cil dormait encore à point fermé. Elle lui adressa un sourire tendre et retourna à son "inspection". Entrouvrant les rideaux, elle osa un oeil indiscret sur la rue en contre bas.

Trois gardes armés de la milice, revenaient des bois environnants, entourés de quelques curieux. Deux d'entre eux transportaient ce que l'elfe identifia comme un cadavre couvert d'un drap. Quelques tâches de sang transperçaient la blancheur immaculée de ce dernier, s'étirant en arabesques d'un rouge sombre en deux endroits.

La Fille de l'Aurore écarquilla les yeux, enfila rapidement quelques vêtements et gagna à son tour la clameur de la ville. Sans perdre une minute elle s'avança d'un pas décidé vers l'un des miliciens, s'adressant à lui avec courtoisie mais fermeté :

- Qu'est-il arrivé ?

- Un règlement de compte semble-t-il... -lâcha ce dernier à demi mot, pestant contre la curiosité qui l'entourait : "tous des rapaces..."-

- Mais comment est-il mort ?

- Egorgé et une dague plantée dans le coeur. Vous aimeriez voir ? -répondit sèchement le garde pour décourager la gêneuse-

Le doux visage d'Aurorielle s'affubla d'un rictus de mécontentement. Visiblement elle n'était pas à sa place et, vraissemblablement, les questions qu'elle pouvait poser dérrangeaient.

- Mais...

Le garde la coupa net dans sa phrase sur un ton qui ne laissait que peu de place à une quelconque négociation.

- Circulez à présent! Il n'y a plus rien à voir!

Tandis que certains s'accrochaient encore au cortège funèbre, d'autres, comme Aurorielle, regagnaient leurs occupations quotidiennes. Volant comme la providence jusqu'à son oreille, les rumeurs environnantes répondirent à ses dernières questions. "C'est un elfe... Un véritable poivrot... Personne ne connaît son nom, mais j'ai entendu l'un des garde parler d'assassinat..."

"Assassinat"... Ce mot éveillait en elle de douloureux souvenirs. Ceux d'un passé lointain qu'elle avait longtemps cherché à oublier avant de décider de l'affronter. Sa rencontre avec Crileloup était liée à cette haine vicérale des assassins qui avait longtemps coulé dans ses veines. Une année plus tôt elle avait réussi à infiltrer Lacrima Nocta, parasitant lentement l'organisation criminelle dans le but de livrer cette lie à la justice d'Azeroth. Mais la confrérie s'était dissoute d'elle même, ne laissant sur son passage qu'un souvenir fugace. C'était à cette même époque que son coeur et son âme se livraient, désarmés, à Cil.

La Guerrière déambulait plus qu'elle ne marchait pour rentrer rejoindre son compagnon. Sa tête était ailleurs, cherchant à comprendre les raisons de cette découverte. Elle connaissait les méthodes des assassins... Pourquoi ne pas avoir fait disparaître le corps ? Pourquoi laisser volontairement le cadavre si visible ? Peut-être le meurtrier avait-il été dérangé dans sa tâche... Dans ce cas là il devait y avoir un témoin... L'hyppothèse était plausible, mais une voix en son fort intérieur lui disait que non. Elle avait la désagréable sensation que quelque chose était en marche. Ce mort n'était pas une erreur. Non... C'était une carte de visite. Bientôt Stormwind résonnerait de la rumeur de cet assassinat, laissant présager que quelqu'un effectue cette basse besogne. Elle en était sûre à présent. Les rouages du destin avaient repris leur lente rotation, entraînant avec eux, la vie des malheureux imprudents.

Elle grimpa deux à deux les marches de l'auberge, regagnant la chambre. Cil dormait toujours... Elle vint le rejoindre, écartant quelques mèches de cheveux du visage de son aimé, le contemplant avec amour avant de le réveiller avec douceur, déposant sur son visage endormi, quelques baisers.

- Mon amour... Réveille toi... -lui souffla-t-elle à l'oreille- Stormwind est annimée aujourd'hui. J'ai besoin de ton aide. Quelque chose est en marche...

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Elle lui parle...
Il ne saisit pas encore tout, noyé dans la torpeur de la nuit et la fin de son rêve.

Machinalement il l'attrape et l'enlace.
Elle tombe sur lui, rit, puis ronchonne.
Ils roulent dans le lit, il émerge à la conscience.
Elle arrête de râler, le regarde sans doute... il ne sait pas, il a déjà refermé les yeux.
Il aime son odeur.
Ses lèvres glissent dans le cou de sa promise qui se tend à sa rencontre en passant la main dans ses cheveux.

Ses mains audacieuses constatent bien vite qu'elle est habillée... bien trop à son goût... bien trop pour sa volonté à peine éveillée : il retombe mollement en se contentant de couvrir son visage de petits baisers.

- "Il se passe des choses en ville ! Bouge-toi gros fainéant !" le taquine-t-elle gentiment en le chatouillant pour le repousser.

Il ne dispose pas, lui, de la protection de ses vêtements. Il est à elle, dans tout la majesté de sa virilité matinale. Il ne cherche pas à se défendre. Elle en joue, taquine, puis se redresse subitement en lui jetant ses affaires, le regard horriblement malicieux.

"Alors, réveillé ?" lui lance-t-elle encore en tirant un petit bout de langue qu'il se retient d'aller croquer.

- "Tu ne perds rien pour attendre ma louve !" gronde-t-il, faussement menaçant tout en enfilant enfin ses vêtements.
- "J'espère bien mon loup..." murmure-t-elle, sensuelle.

Elle le regarde, juste assez gourmande pour qu'il y décèle une promesse tandis qu'elle vient l'aider à agrafer ses épaulières. Son regard azuré reprend bien vite une lueur plus sérieuse : la guerrière froide et terriblement intuitive qu'elle sait être se met en marche.

Il jette quelques quartiers de viande soigneusement emballée à ses bêtes qui n'attendaient que ça.

- "Qu'est-ce qui se passe ?" demande-t-il en soulevant leurs sacs pour les prendre en bandoulière.

Rapidement elle lui rapporte les faits.